Chaos


La théorie du chaos affirme qu'une erreur très faible sur un paramètre
peut avoir une influence importante sur la situation résultante à une date ultérieure


Prenons un exemple :
Soit une population de brochets dans un étang. Ces brochets mangent des petits poissons. La population de brochets croit tant qu'il y a de la nouriture en abondance.

La variation de population au cours du temps est égale aux naissances moins les morts. La natalité et la mortalité sont proportionnelles à la population, ce qui conduit au modèle malthusien :
popsuivante = r x popprécédente, avec r = taux de natalité.
La résolution de cette équation donne :
pop = popinitiale x  ert

Si r>0, la population explose. Si r<0, la population s’éteint. Si r=0,
natalité et mortalité sont rigoureusement égales (ce qui n'arrive jamais), et la population reste inchangée.

En fait, ce modèle n'est pas réaliste, et 
les brochets ont d’autres perspectives que disparaître ou croître exponentiellement.

En effet,
le nombre de petits poissons fini par décroître, mangés par les brochets, car ils n'ont pas le temps de se reproduire. La population de brochets fini par décroître, puis crôtre à nouveau, etc, pour tendre vers une valeur d'équilibre. Ceci signifie que l'étang, avec les petits poissons, a pour les brochets une certaine capacité d’accueil, ou capacité biotique. Notons k cette capacité biotique.

La variation de population au cours du temps répond au modèle de Verhulst. L'idée est de garder le modèle malthusien quand la population est petite et de le ralentir quand la population est trop grande, ce qui conduit à l'équation logistique suivante :

popsuivante = r x popprécédente x (1 – k x popprécédente)


Que devient à terme cette population ?

Réponse : cela dépend de la population de brochet et de petits poisson au départ,
et surtout du taux de croissance relatif de la population de brochets !


Simulons l'évolution de cette population. La solution de ce problème répond à l'équation logistique suivante :

popsuivante = r x popinitiale x (1 – k x popinitiale) à la 1ère génération
...
popsuivante = r x popprécédente x (1 – k x popprécédente) à une génération quelconque

Dans lequel
  1. popinitiale est la population de départ population de départ, donnée en pourcentage de la population maximale (donc entre 0 et 1)
  2. r est le taux de croissance r (reproduction = taux de natalité)
  3. k est la capacité biotique (ou capacité d'accueil) de l'étang ; par la suite, pour simplifier, nous le prendrons égal à 1.
Après quelques générations, nous nous trouvons en face de plusieurs cas :
  • si 1 <=  r  <= 3 la population tend vers une limite ;
  • si r dépasse 3, la population commence à osciller entre plusieurs valeurs, et il y a des bifurcations , et donc plusieurs avenirs possibles pour la population (2 avenirs possibles, puis 4 à partir de 3.45).
  • si r dépasse environ environ 3.57, la séquence des populations devient chaotique (imprévisible).

Voici le graphe fait sous Excel :



Si nous construisons un graphique montrant, pour différente valeur de r, la valeur limite de la population (appelée attracteur) , nous avons :



On obtient toujours un diagramme du genre ci-dessus, ou diagramme de bifurcation.
  • Si 0≤ r ≤1, l’espèce finira par mourir, quelle que soit la population de départ.
  • Si 1≤ r ≤2, la population finit par se stabiliser autour de la valeur (r-1)/r   (ex : 0.33 pour r = 1.5 ) , quelle que soit la population initiale. 
  • Si 2≤ r ≤3, elle finit également par se stabiliser autour de (r-1)/r  (ex : 0.6 pour r = 2.5 ) après avoir oscillé autour pendant quelque temps. La vitesse de convergence est linéaire, sauf pour r = 3 où elle est très lente. 
  • Si 3< r ≤1+√6 (environ 3,45), elle finit par osciller entre deux valeurs, dépendantes de r, mais pas de la population initiale.
  • Si 3,45< r <3,54 (environ), elle finit par osciller entre quatre valeurs, là encore dépendantes de r mais pas de la population initiale.
  • Si r est légèrement plus grand que 3,54, la population finit par osciller entre huit valeurs, puis 16, 32, etc. L’intervalle des valeurs de r conduisant au même nombre d’oscillations décroît rapidement ( le rapport entre deux de ces intervalles consécutifs se rapproche à chaque fois de la constante de Feigenbaum, δ = 4,669….) Aucun de ces comportements ne dépend de la population initiale.
  • => Jusque là, la valeur finale est indépendante des conditions initiales; - voir graphe ci-dessous.
  • Vers r = 3,57, le chaos s’installe. Aucune oscillation n’est encore visible et de légères variations de la population initiale conduisent à des résultats radicalement différents - voir graphes ci-dessous.
  • La plupart des valeurs au-delà de 3,57 présentent un caractère chaotique, mais il existe quelques valeurs isolées de r avec un comportement qui ne l’est pas : de l'ordre au milieu du chaos ! Par exemple vers 3,82, un petit intervalle de valeurs de r présente une oscillation entre trois valeurs et pour r légèrement plus grand, entre six valeurs, puis douze, etc. D’autres intervalles offrent des oscillations entre 5 valeurs, etc. Toutes les périodes d’oscillation sont présentes, là encore indépendamment de la population initiale.
  • Au-delà de r=4, la population quitte l’intervalle [0;1] et diverge quasiment pour toutes les valeurs initiales.

r=2.9 : la valeur finale est indépendante des conditions initiales


r=3.8 : la valeur finale est dépendante des conditions initiales
Dire "les mêmes causes produisent les mêmes effets n'a plus de sens
lorsqu'une petite variation de la cause produit une grande variation de l'effet,
c'est le chaos




Sur le sujet, lire :
http://fr.wikipedia.org/wiki/Théorie_du_chaos
et aussi, pour les plus matheux :
http://fr.wikipedia.org/wiki/Suite_logistique
ainsi que http://fr.wikipedia.org/wiki/Modèle_de_Verhulst


Voir aussi le site
http://www.astrosurf.com/cieldaunis/chaos/index.html
Site fort bien fait et très complet (avec qq petites erreurs)


et aussi,
sur l'évolution (non chaotique) d'une population d'éléphant :
http://math.unice.fr/~diener/MAB0809/LOGISTI.pdf
qui permet de se familiariser avec le modèle de Verhulst.

sur l'évolution d'une colonie de chenille dans un environnement d'épicéa :
http://images.math.cnrs.fr/La-chenille-de-l-epicea.html

les généralistes : :
http://just.loic.free.fr/index.php?page=hist

les découvreurs :
http://fr.wikipedia.org/wiki/Edward_Lorenz
http://fr.wikipedia.org/wiki/Benoit_Mandelbrot
http://en.wikipedia.org/wiki/Mitchell_Feigenbaum

... et les spécialistes :
http://www.matierevolution.fr/spip.php?article706


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